Se battre contre les murs : Rebâtir brique par brique

Publié par

Cue Gangsta’s Paradise

Bienvenue à Cité-des-Prairies, où les jeunes vont en time out lorsqu’ils ont commis une infraction ou qu’ils sont sous la protection de l’État. Un endroit si peu accueillant qu’on y filmait des scènes de la populaire série Unité 9. C’est pourtant là qu’on retrouve une grande proportion des adolescents purgeant une peine en centre fermé au Québec. Ils viennent en majorité des quartiers mal aimés de Montréal : Côte-Des-Neiges, Saint-Laurent, Montréal Nord. Ils sont victimes de leur milieu et de leurs origines. Le sociologue Nicolas Sallée s’est associé à la bédéiste Alexandra Dion-Fortin pour raconter leur quotidien dans Se battre contre les murs.

Se battre contre les murs, La Pastèque, 2021

Des journées régimentées qui ne laissent rien au hasard sont le lot des délinquants fréquentant l’établissement. Ils sont détenus non pas pour expier un crime, mais pour être réhabilités. Les éducateurs qui veillent sur eux croient en leur mission et mettent tout en œuvre pour insuffler une parcelle d’espoir à ces jeunes mésadaptés pour qui souvent la voie est déjà toute tracée. On veut les préparer à la vie en société sauf que… ce n’est pas la vraie affaire. Les gars ne sont pas cons et savent très bien ce qui les attend à l’extérieur. Ils se prêtent au jeu pour une poignée de cognitivo-dollars qui leur achètent des privilèges le temps de leur captivité. Il faut donc les prendre là où ils sont dans leur cheminement et s’assurer à ce que jamais leurs destins ne se croisent à nouveau.

Se battre contre les murs, La Pastèque, 2021

 Malgré le caractère austère du lieu, on essaie de créer un semblant de cellule — pun intended — familiale. Bon, il est certain que les caméras braquées sur l’ensemble de la population ajoutent à l’ambiance carcérale qui y règne, mais il en est ainsi depuis l’émeute de 2013. Il ne faut pas oublier que l’on est dans le jail comme se targuent certains pensionnaires. Les autres font plutôt état d’un environnement propice à l’apprentissage où l’on peut s’atteler à ses études avec des profs dévoués à leur tâche. Il n’en demeure pas moins que : « moi, un endroit où je peux pas sortir et où je dois demander à quelqu’un d’ouvrir ma porte pour aller pisser et chier, j’appelle ça une prison. » Il n’y a pas si longtemps que le Québec s’est doté d’un programme de réinsertion et l’équilibre est précaire entre la vocation de Cité-Des-Prairies et son passé plus répressif de l’époque où on le nommait Centre Berthelet.

Se battre contre les murs, La Pastèque, 2021

 L’adage — certes — éculé voulant qu’une image vaille mille mots est particulièrement vrai dans le cas de ce bédéreportage. Il s’installe une proximité avec les sujets rendue possible grâce aux traits de Dion-Fortin. Les propos recueillis par le sociologue Nicolas Sallée nous projettent dans une réalité qui met en relief les failles d’un système où la pauvreté et le racisme subit par une frange de la société ne laissent pas grand chance de réussite. Il est tout de même réconfortant de savoir qu’à l’intérieur des murs, il y a des adultes qui n’ont pas baissé les bras et sont prêts à les attraper lorsqu’ils trébuchent.

Se battre contre les murs, La Pastèque, 2021

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.