On naît seul, on meurt seul et entre-temps on le demeure assurément. Vous aurez beau arguer que l’humain est un animal social qui a besoin du contact des autres — certes — mais vous savez au plus profond de votre être que dans les faits, ce n’est pas si évident. On est lâché dans le monde avec une vague idée de ce qu’il faut faire et on essaie de devenir une personne bien en se posant sans cesse des questions qui remettent en doute nos actions. Cela nous épuise, nous émousse et amoindrit notre propension à ressentir les émotions. Catherine Ocelot ne fait pas exception à la règle et s’attarde aux liens qui nous unissent dans Symptômes.
All the lonely people
Where do the all come from?
All the lonely people
Where do the all belong?

Tout commence par une histoire d’un grave trouble de solitude (stade 5) diagnostiqué à Mme Gariépy. Son plan de traitement prescrit entre autres de côtoyer un groupe de soutien : Solitudes Anonymes. Elle y fait la rencontre de femmes aux parcours menant invariablement à cette oasis où elles peuvent s’épancher sans jugement ni ambages. Des personnes, dont les mots et les maux, sont imbriqués puisque les paroles blessent ou peuvent guérir. Chacune y va de son récit et reçoit la compassion et le réconfort dont nous manquons tous cruellement. L’autrice assiste aussi aux réunions pour calmer son cœur qui s’affole face au marasme ambiant. Elle pratique tant bien que mal l’acceptation radicale prônée par Oprah et Lady Gaga mais la vie étant ce qu’elle est… les embûches se succèdent et sa démarche est chancelante. Trouve ta mère intérieure !
Les petits fils de couleur filent dessus filent dessous tous les dessins de mon cœur.
Catherine a une théorie : nous sommes joints par des fils à ceux avec qui nous avons tissé des liens. Bien ordonnés, ils sont emmaillotant, mais enchevêtrés, ils nous suffoquent. Tout demeure des suppositions, mais il faut avouer que la croisée des chemins semble parfois prédestinée. On y fait des rencontres marquantes qui vont aider à colmater les brèches ou au contraire, laisser des trous béants dans notre armure. La vie est un combat perpétuel et il vaut mieux être bien entouré pour faire face à l’adversité.

À la manière des plantes, l’âme a besoin de lumière et de douces paroles d’encouragement pour croître et s’élever vers le ciel. Les végétaux sont omniprésents dans le récit et s’entrecroisent comme les histoires qui parsèment les pages de cette ode à la résilience. Peut-être vivons-nous par procuration à travers ces entités à la fois fragiles et tenaces : tout comme nous.

Une fois de plus Catherine Ocelot nous convie dans son jardin secret où règne confusion et lucidité. Sa conception singulière du monde qui nous entoure émeut et réconcilie avec sa beauté imparfaite. Les magnifiques dessins amplifient le propos et nous transportent dans un univers où les images valent mille mots. Empreint de mélancolie et d’allégresse, voilà une lecture qui vous fera passer par toute une myriade de sentiments.