Il n’y a pas de sot métier, mais ils n’ont pas tous la même valeur aux yeux de la société ; certains sont considérés comme essentiels alors que d’autres sont en voie d’être effectués par des robots. N’empêche, il y a une job qui demande des skills biens précis qu’aucun tas de férial à circuits intégrés ne pourrait exécuter : le transport d’êtres humains. On ne parle pas ici de conduire un autobus ou un taxi, mais plutôt un véhicule personnel avec mission d’amener un colis précieux à bon port. Est-ce légal… probablement pas. Ça prend tout de même des gens pour naviguer les zones grises et les dédales administratifs afin d’apporter de l’aide à ceux à court de moyens comme dans Débarqués.
Ce n’est pas de grandeur d’âme que Gil va jusque dans le fin fond des bois avec deux handicapés : un quadriplégique et un trisomique. Il y a de l’argent à faire avec le malheur des autres. En revanche, il n’est pas un rapace qui s’en met plein les poches en se foutant éperdument des droits et de la dignité de ses passagers. Ces pauvres bougres n’ont plus de foyer ; ils sont abandonnés à leur sort. Ce n’est pas facile de s’occuper de personnes vulnérables qui dépendent d’autrui pour subvenir à leurs besoins. C’est un choix déchirant — dans la plupart des cas — de s’en départir, mais la vie est parfois mal faite. Il doit donc les amener à leur dernière demeure. Non, il ne s’agit pas de les abattre derrière la grange comme des animaux malades, mais plutôt de les débarquer sur une île où se trouve une clinique « off the grid » où ils seront pris en main…du moins, on l’espère.
« Je vais crevez vous comprenez ? Et je veux pas que mon Winston finisse tout seul dans un de ces centres où on est moins bien traité qu’à la SPCA !!! »
Il faut être fait fort. e pour accepter un tel contrat sans broncher. Ça prend surtout une bonne dose d’humanité et de compassion. Par contre, Jean-Fran, le helper engagé par Gil en manque cruellement et risque de faire foirer le plan réglé au quart de tour avec son attitude de marde. Cela finira par leur coûter bien plus qu’une liasse de billets en petites coupures. Il ne faut pas oublier qu’il y a des vies en jeu. Ils sont tous dans le même bateau qui pourrait chavirer d’un moment à l’autre. Il s’agit de ne pas trop faire de vagues et de go with the flow ou comme dirait Coco « c’est pa’ti mon kiki. »
Débarqués c’est avant tout un road trip qui aurait pu être un road movie dans la façon dont il a été scénarisé (André Marois) et mis en image (Michel Hellman.) Le noir et blanc se prête bien au silence du long trajet parsemé de bribes de conversations à travers cette contrée sauvage. En plus d’offrir une trame narrative des plus divertissante, on se prend à réfléchir au sort des laissés-pour-compte et sur notre devoir collectif de les protéger.