La sérendipité est un bien grand mot pour décrire le phénomène d’être au bon endroit au bon moment. À l’inverse, la zemblanité est synonyme d’avoir couru après le trouble et de l’avoir trouvé. Tout cela semble relever du hasard et d’un concours de circonstances. Des rencontres fortuites peuvent déclencher une réaction en chaîne qui change le cours d’une vie. C’est évidemment à interpréter et le fatalisme est une posture qu’on est libre d’adopter ou non. La jeune héroïne de Justine et Les fils du King en est un parfait exemple, elle qui a le don d’attirer les personnalités atypiques dans sa trajectoire.
Perdre ses parents est rarement une expérience agréable ; ce l’est d’autant plus s’il s’agit d’un événement aussi soudain que brutal : Justine n’avait que 17 ans lorsqu’on lui annonce que l’avion dans lequel les siens prenaient place s’est écrasé, l’obligeant à aller vivre en appartement avec une coloc lourde — au sens propre comme au figuré qui lui cache des affaires quand elle ne lui demande pas de lui faire réchauffer des pogos au micro-ondes. Ça n’augure pas bien non plus à sa nouvelle job de secrétaire au centre sportif à la gloire d’Elvis où elle apprend à faire du breakdance dans le dos du patron un peu crosseur et ben trop intense. Au moins, il y a un gars cute, mais weird qui lui tourne autour. Il a toute une panoplie de costumes qu’il aime bien parader au gré de ses humeurs très variables. Il ne semble plus prendre sa médication. Ça fait des feux d’artifice qui dissipent la grisaille du quartier malfamé de Pointe-Gatineau qu’ils habitent. Un microcosme de misère et de bonté où les jours s’égrènent selon un différend fuseau horaire ; là où les rêves vont mourir entre deux caisses de bières dans un sous-sol aux murs jaunis et des minous maigrichons.

Ce n’est pas grave Justine, tu vas t’en remettre…
Ça revient encore à dire que ceux qui sont nés pour un petit pain ne peuvent pas s’élever au-dessus de leur condition. La pauvre fille a été catapultée dans cet univers sans avoir pris part au meeting. C’est plate quand même d’être un paratonnerre à emmerdes. Un catalyseur d’événements tragiques. Au moins, elle n’est pas trop maganée par des années de ce régime et il lui reste l’espoir de s’en sortir sans trop de séquelles. Sans bouée ni phare à l’horizon on se demande tout même si elle ne finira pas par sombrer. Elle doit avoir mal au cœur à force d’être barouettée de même.
À l’instar de Disney (en pas mal moins evil) Iris Boudreau extrait de la chambre forte un de ses futurs classiques. Futur parce que cette pépite est un peu passée dans le beurre lors de sa parution en 2012. Sans étonnement on retrouvait déjà à l’époque cette imagination foisonnante où s’entremêlent personnages plus grands que nature et observations du quotidien. On dirait un bon film indy : un amalgame entre Gummo et Napoleon Dynamite. À lire ou relire pour découvrir ou redécouvrir cette talentueuse autrice.